パリ・コミューン史料

 1871年3月20日 「ラ・コミューン・ド・パリ官報 Journal Officiel de la Commune de Paris」第1号 掲載論文
(non title)
Tout mouvement politique qui ne porte pas en soi une idée nouvelle, créatrice, féconde, ou qui, portant cette idée, ne fait pas surgir aussitôt des hommes capables de la dégager et de la défendre, est condamné, même après un éclatant tromphe de la force, à avorter misérablement.
Ces hommes de réflexion profounde et d’action rapide se trouvèrent prêts aux premières journées de 1879. Aux mouvements instinctifs, tumultueux de la foule ils donnèrent l’âme, l’intelligence, la vie enfin ; ils en firent des mouvements humains, philosophiques pour ainsi dire, et en quelques mois la foule instinctive était devenue un grand peuple, conscient de lui-même, le peuple de la Révolution.
Les Socrates accoucheurs d’idées n’ont pas manqué non plus à la révolution du 18 mars.
Après l(avoir faite, ils l’ont acclamée, défendue, démontrée. Hier elle parlait ; dès aujourd’hui elle agit et ainsi elle se démontre encore.
Les combattants du 10 août ne se bornèrent pas à proclamer la liberté, l’égalité, la fraternité ; ils définirent le sens de ces frandes paroles qui, réunies dans cette triade immmortelle, avaient encore, pour leurs contemporains, quelque chose d’étrange, de vague et d’inddeterminé ; ils en indiquèrent la portée et les conséquences, ils en moutrerent les applications à la vie civile et politique.
Si les révoltés du 18 mars n’avaient su au lendemain de leur victoire que bégayer le mot de Commune, sans déterminer dès l’abord les principes élémentaires, primordiaux de l’organisation communale, il ne resterait peut-être aukourd’hui, de leur vaillance et de leur force, que le souvenir d’une défaite.
Pendant vingt ans peut-être ils auraient subi les outrages et les calomnies de l’histoire mensongère, comme les insurgés de juin 1848, auxquels il ne manqua pour triompher que de concevoir, même imparfaitement, la question impérieuse et redoutable qu’ils avaient sentie et posée.
Avouons-le, la tâche état moins dure aux hommes du 18 mars. Le dplorable malentendu qui, aux journées de juin, arma l’une contre l’autre deux classes, toutes deux intéressées, sinon également, aux grandes réformes économiques, cette funeste méprise qui rendit la répression de juin si sanglante ne pouvait se renouveler.
Cette fois l’antagonisme n’existait pas de classe à classe, il n’y avait pas d’autre sujet de lutte que la vieille guerre, toujours recommencée, bientôt finie sans doute, de la liberté contre l’antorité, du droit municipal et civique contre l’absorption et l’arbitraire gouvernemental.
Paris, en un mot, était prês à se lever tout entier pour conquérir son indépendance, son autonomie ; il voulait, en attendant que la nation le voulût avec lui, le self-government, c’est-à-dire la République.
Oh ! non, ils ne calomniaient pas l’exécutif, ceux qui l’accusaient de conspirer pour la monarchie. Indigné, l’exécutif protestait de sa sincérité et de ses bonnes intentions.
Eh ! que pouvaient faire au peuple de Paris les intentions de l’exécutif ! Il y a quelque chose qui domine les intentions des hommes, c’est la force des choses, la logique des principes.
Centralisateur à outrance, au point de priver Paris pendant des mois et sans fixer de terme à sa déchéance, de cette municipalité subordonnée, restreinte, que la tutuelle gouvernementale concède aux plus modestes villages, au point de lui maintenir le stigmate avilissant que l’Empire lui avait imprimé, ce caractère honteux de ville-caravansérail qui chaque jour effacait davantage son originalité et son génie : centralisateur par goût et par système, l’exécutif nous précipitait de nouveau, qu’il en eût ou non conscience, vers la forme la plus parfaite, la plus matérielle de la centralisation administrative et politique, vers la royauté.
Que les partisans de la République centraliste, bourgeoise, fondée sur l’antagonisme du citoyen et de l’Etat, du travail et du capital, de la classe moyenne et de la plèbe, que les formalistes y réfléchissent : leur utopie a toujours servi de pont à la monarchie ; c’est elle qui pendant longtemps a tué, en France, l’idée même de république.
Aujourd’hui cette idée abattue se redresse plus fière et plus triomphante, arborant audacieusement son premier drapeau, ajoutant à son nom nouveau son vieux titre patronymique. Fidèle à sa tradition, consciente d’elle-même, la République est aussi la Commune.
C’est la revanche de la science et du travail, de la liberté et de l’ordre, dont la routine gouvernementale avait pendant près d’un siècle retardé l’avénement. S’élevant au-des-sus des brouillards qui l’enveloppaient, débarrassée des obstracles qui lui barraient le passage, sûre de sa force, la Révolution va de nouveau, par son exemple et sa propagande, répandre sur l e monde la liberté, l’égarité, la justice.